Publié le : 09/03/2021 15:23:17
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Depuis la fin de la Première Guerre Mondiale, les codes changent. Fini les volutes et les formes organiques, la tendance est à la rigueur et à la géométrie. A l’image du courant Cubiste, l’Art Déco met en avant la géométrisation des espaces.  

En 1925 se tient l’Exposition des Arts Décoratifs et industriels modernes à Paris. D’envergure internationale, l’évènement fait la promotion d’une nouvelle architecture ainsi que des dernières innovations esthétiques en matière de décoration intérieure. C’est la première fois qu’un courant artistique se développe dans le monde entier.

L’art de décorer est partout. Les livres ne font pas exception. L’illustration prend un nouveau virage. Elle se dore de préciosité, à l’image du luxe des salons de Jacques Doucet[1].

 

François Louis Schmied

Né en 1873 à Genève (Suisse), François Louis Schmied gardera toute sa vie une nostalgie liée à l’Orient - son grand père ayant grandi en Algérie. Il suivit une première formation de graveur dans sa ville natale qu’il compléta par une formation dans les arts du livre à Paris, où il s’installa définitivement à partir de 1895.

François Louis Schmied deviendra, dans les années 30, un des représentants majeurs du courant Art Déco.

Son goût du papier et son exigence l’amèneront à collaborer avec les plus grands. En 1910, la Société du Livre Contemporain lui commande 90 gravures sur bois d’après les dessins de Paul Jouve pour le Livre de la Jungle de Rudyard Kipling. Le travail durera jusqu’en 1918 à cause de la guerre. A partir de là, sa réputation n’est plus à faire. En 1922, il fonde sa maison d’édition afin de maitriser toute la chaîne de fabrication de ses créations.

L’Art du livre

Dans son atelier, F. L. Schmied aborde tous les aspects du livre. De la typographie à la mise en page, des gravures illustrées à la reliure, il façonne le livre dans un contexte amical et passionnant. Bien entouré, Schmied collabore la plupart du temps avec ses amis artistes, dont Paul Jouve fait partie, mais aussi Jean Dunand[2] et Jean Goulden[3] avec qui il exposera dans les galeries parisiennes. A la même époque, l’artiste-éditeur collabore avec le sculpteur et illustrateur hongrois Gustave Miklós de manière anonyme. Cette relation non officialisée questionne parfois les bibliophiles sur la provenance et l’appartenance de certaines illustrations de Miklós pour Schmied (et vice versa).

Pourtant, le travail de Schmied est aisément reconnaissable. Dans un style Art Déco emplie de modernité, ses ouvrages montrent la complexité technique du maître graveur. Il usa entre autres de la technique du camaïeux[4]. Chaque réalisation est synonyme de luxe, ses livres abondent de dorures, d’enluminures, de règles typographique et d’encadrement inspirées des incunables. Tiré en petit nombre, 150 exemplaires maximum, ses éditions se font rares. L’artiste pouvait mettre jusqu’à 6 ans pour finaliser une œuvre.

 

L’héritage de Schmied

En 1921, Schmied se voit confier les illustrations des Climats (poèmes de la Comtesse de Noailles), dont la maquette et les originaux seront exposés à la Galerie Georges Petit quelques années avant la parution (1924). L’année de sa publication, son fils, Théo Schmied, vient travailler à l’atelier et diriger les équipes. La relève assurée, François Louis partira au Maroc en 1933 et y finira ses jours en 1941.

François Louis Schmied est aujourd’hui un des artistes des Arts Déco le plus côté. Sa sensibilité et son sens aigu des matières font de cet artisan du livre un Maître de l’édition d’Art et ses ouvrages sont parmi les livres modernes les plus recherchés par les collectionneurs bibliophiles.

 



[1] Jacques Doucet est un grand couturier français, collectionneur et mécène du début du XXe siècle. Il fonde une des premières Maison de Haute Couture parisienne. Il est connu comme précurseur de la décoration Art Déco. En 1972, une vente majeure de sa collection Art Déco re-popularise ce courant auprès du grand public.

[2] Jean Dunand compte parmi les plus grands créateurs Art déco. Artiste pluridisciplinaire, il a collaboré avec le décorateur Jacques-Emile Rulhmann. Ses laques orneront le Palais de la Porte Dorée de Paris et de nombreuses reliures de F. L. Schmied.

[3] Louis Paul Jean Goulden abandonna son premier métier en tant que médecin et devint le mécène du groupe Duand-Goulden-Jouve-Schmied. Il deviendra, en outre, un spécialiste des émaux de décor.

[4] Le camaïeu est un procédé particulier à la gravure sur bois et à la lithographie. Plusieurs planches sont gravées et se superposent à l'impression ce qui apporte un effet de motif et de silhouette en transparence.

  • Découvrez les ouvrages de François Louis Schmied archivés dans notre collection en suivant les liens suivants : Les Climats / L'Odysée